Une menace apparemment absurde émise par l’Iran au début du conflit Israël-Hamas prend aujourd’hui une nouvelle dimension. Téhéran avait averti qu’il pourrait fermer le détroit de Gibraltar si Israël poursuivait son offensive à Gaza. Si cette déclaration paraissait infondée, faute d’une présence militaire iranienne à proximité du détroit, un nouveau rapport du Washington Post met en lumière les fondements stratégiques de cette menace : l’Iran renforce sa présence indirecte dans la région via le Front Polisario.
Selon ce rapport, l’organisation libanaise Hezbollah, bras armé de Téhéran, a formé des combattants du Front Polisario, groupe séparatiste basé en Algérie et en lutte pour l’indépendance du Sahara occidental face au Maroc. Des centaines de ces combattants seraient aujourd’hui actifs en Syrie, aux côtés des forces fidèles au régime de Bachar al-Assad.
Un réseau bien établi entre Téhéran, le Hezbollah et le Polisario
Les liens entre l’Iran et le Polisario ne datent pas d’hier. Dès 2018, le Maroc avait rompu ses relations diplomatiques avec Téhéran, accusant l’ambassade iranienne à Alger de faciliter le transfert d’armes sophistiquées – notamment des missiles sol-air – au Polisario via le Hezbollah.
En 2022, un représentant du Front Polisario avait même déclaré que l’Iran s’apprêtait à leur fournir des drones kamikazes. Quelques semaines plus tard, le Maroc apportait à l’ONU des preuves visuelles confirmant l’arrivée d’armes avancées, dont des drones iraniens, entre les mains du groupe. En janvier dernier, des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux montraient une simulation d’attaque de drones contre le Maroc, attribuée au Polisario.
Alger soutient ouvertement le mouvement séparatiste
Derrière le Polisario, l’Algérie joue un rôle central. Algiers fournit au mouvement séparatiste un appui logistique, financier et diplomatique. Elle héberge sa direction dans les camps de réfugiés de Tindouf, délivre des passeports à ses membres et soutient sa campagne militaire contre Rabat.
En novembre 2024, le Front Polisario a lancé une attaque à la roquette lors d’un événement marquant la Marche Verte de 1975, une mobilisation historique de 350 000 Marocains pour revendiquer le Sahara occidental. Les projectiles ont été tirés depuis le territoire algérien, selon des sources marocaines.
Des ramifications avec le djihadisme sahélien
Les connexions du Polisario avec des groupes extrémistes armés préoccupent également. Adnan Abou al-Walid al-Sahraoui, ex-chef de l’État islamique au Sahel tué en 2021, avait occupé un poste élevé au sein du mouvement. Tindouf, selon plusieurs rapports, serait devenu un foyer de radicalisation et un centre de recrutement pour les réseaux djihadistes d’Al-Qaïda au Maghreb islamique et de Daech.
L’impact humain est dramatique. Une ONG genevoise a dénoncé devant le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies l’enrôlement forcé de milliers d’enfants dans des activités militaires, au détriment de leur éducation, dans les camps contrôlés par le Polisario.
Appel à l’action : Washington interpellé
Face à cette escalade, les auteurs du rapport appellent les États-Unis à ouvrir rapidement leur consulat à Dakhla, renforçant ainsi leur reconnaissance de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental – un engagement pris par l’administration Trump en 2020. En outre, ils suggèrent de classer le Front Polisario comme organisation terroriste étrangère, en raison de son alliance stratégique avec l’Iran et des menaces qu’il représente pour la stabilité régionale et les intérêts américains en Afrique.