samedi, décembre 6, 2025
No menu items!
spot_imgspot_img
No menu items!
AccueilACTUALITESÉDITORIAL :Succès Masra, l’opposant face au mur du pouvoir

ÉDITORIAL :Succès Masra, l’opposant face au mur du pouvoir

L’arrestation de Succès Masra, figure politique majeure au Tchad, n’est pas un simple fait divers judiciaire. Elle symbolise un moment de bascule dans la trajectoire démocratique du pays, révélant les limites d’une transition annoncée mais encore inachevée.

Ancien opposant radical au régime du défunt président Idriss Déby Itno, Masra avait fait le choix, en 2023, de rejoindre le gouvernement de transition conduit par Mahamat Idriss Déby. Ce tournant avait surpris, voire choqué une partie de ses partisans, mais il l’assumait comme un pari : celui d’influer sur le système de l’intérieur, pour construire une voie tchadienne vers la démocratie.

Ce pari a échoué.

La présidentielle de mai 2024, que Masra a dénoncée comme irrégulière, a scellé sa rupture avec le pouvoir. Loin d’être entendu, il a été marginalisé, puis accusé d’avoir incité aux troubles à Mandakao et dans d’autres régions du sud. Son arrestation, le 16 mai 2025, et sa détention prolongée, ont soulevé un tollé au sein de l’opinion, amplifié par sa grève de la faim, suspendue début juillet après près de 40 jours.

Dans cette affaire, personne ne sort vraiment indemne.

Le gouvernement affirme agir dans le respect de la loi, au nom de la sécurité nationale. Mais les conditions de la procédure judiciaire, le calendrier politique tendu, et les silences gênants autour des droits de la défense sèment le doute sur la sincérité des poursuites. L’opposition, elle, peine à parler d’une seule voix, oscillant entre mobilisation et prudence.

Au fond, ce que révèle l’affaire Masra, c’est le besoin urgent de redéfinir les règles du jeu politique au Tchad. La transition avait suscité des espoirs. Elle devait tourner la page de décennies d’autoritarisme. Mais elle semble reproduire, parfois à peine masqués, les mécanismes de contrôle, de fermeture et de disqualification de toute voix dissidente.

Loin d’apaiser, cette stratégie risque de raviver les tensions, de radicaliser les frustrations, et de faire reculer les perspectives d’un dialogue national sincère.

Il est encore temps d’éviter cette dérive. Cela passe par une justice indépendante, un traitement équitable de tous les acteurs politiques, et une volonté réelle de construire un État de droit, où le pluralisme ne se résume pas à une vitrine.

Succès Masra n’est ni un saint, ni un danger pour la République. Il est un acteur politique avec ses convictions, ses erreurs, mais aussi son droit à exister dans l’arène démocratique. L’empêcher de le faire ne servira ni la stabilité, ni la paix sociale, encore moins l’image d’un Tchad tourné vers l’avenir.

Articles liés
- Advertisment -spot_img

Les plus populaires

Commentaires récents

Djerakoula Ndile Macaire sur BAC 2019: Les résultats sont déjà en ligne