L’annonce de la démolition du Centre d’Éducation et de Formation pour Déficients Visuels et Voyants (CEFODEV), survenue le 2 juillet dernier dans le 9ᵉ arrondissement de N’Djaména, a provoqué une onde de choc au sein de la communauté des personnes handicapées et bien au-delà. Pour beaucoup, cet acte marque un recul inquiétant dans la promotion de l’éducation inclusive au Tchad.
Fondé à Ngonba il y a quelques années par des personnes aveugles elles-mêmes, sans appui de l’État, le CEFODEV offrait un cadre scolaire adapté à plus de 40 enfants non-voyants, devenant au fil des années une institution de référence dans le domaine de la formation spécialisée. Loin d’un simple bâtiment, le centre représentait un espoir, un symbole de résilience et d’autonomie.
Une démolition brutale, sans préavis
D’après une lettre ouverte rendue publique ce 11 juillet, la destruction du centre a été ordonnée sans aucune notification officielle préalable, en pleine période scolaire. Les responsables du CEFODEV dénoncent une opération expéditive, menée au nom d’un projet d’aménagement urbain, sans concertation ni solution de relogement. « C’est une agression contre les plus vulnérables. Un mépris manifeste envers ceux qui ne voient pas mais qui espèrent », écrivent-ils.
Le terrain aurait pourtant été régularisé par les services du cadastre en 2018. Mieux encore, selon les documents annexés à la lettre, des démarches étaient en cours auprès du ministère de l’Urbanisme pour faire intégrer le site dans le plan d’aménagement, afin d’épargner cette structure essentielle pour les déficients visuels.
Un maire pointé du doigt
Dans leur message, les fondateurs du centre s’en prennent violemment au maire du 9ᵉ arrondissement, qu’ils accusent d’avoir orchestré l’opération. Ancien inspecteur de l’Éducation, le maire connaissait pourtant bien le rôle de l’établissement. Ce revirement brutal est perçu comme une « trahison » par ceux qui l’avaient vu autrefois défendre les causes éducatives.
Le ton monte également contre son adjoint, qui aurait tenu des propos jugés désobligeants devant les enfants choqués, affirmant que même le président n’aurait pu l’empêcher de démolir le centre. Une posture perçue comme arrogante et insensible par les défenseurs du projet.
Une école détruite, des vies bouleversées
Les conséquences de cette démolition sont graves : des enfants se retrouvent sans lieu d’apprentissage, les enseignants sont désorientés, et l’avenir du projet est désormais incertain. Les responsables du CEFODEV alertent sur le risque de découragement général, à un moment où les politiques d’inclusion scolaire sont encore fragiles dans le pays.
Un appel au secours lancé à l’État
Dans leur lettre, les porteurs du projet en appellent à l’intervention du gouvernement central et aux partenaires internationaux pour reconstruire ce qui a été détruit. Ils demandent réparation et appellent à la responsabilité de l’État face à la vulnérabilité des populations aveugles.
Pour les membres du CEFODEV, la démolition du centre dépasse le simple cadre local : « Il s’agit d’une atteinte au droit fondamental à l’éducation, à l’égalité des chances, et à la dignité humaine. »




